Eeeet c’est parti pour la grande période des Foires aux Vins !! Vous connaissez bien sûr la partie émergée de l’iceberg, cette effervescence dans les magasins (et sur internet), les prospectus (mails) qui vous tombent dessus, les communications dans la presse… Pour avoir participé à plus d’une sélection de Foire aux Vins, il est temps que je vous dévoile les coulisses de ce moment crucial dans l’année d’un vendeur de vin !
Portrait des Foires aux Vins
La toute première Foire aux Vins (ou FAV) a été imaginée par… Leclerc ! C’est un adhérent breton amoureux du vin qui a lancé le concept en 1973 : une vente de 3 jours dédiée aux beaux vins. Près de 50 ans plus tard, les Foires aux Vins sont incontournables en France. Côté distributeurs comme côté producteurs, cette opération est génératrice de croissance (chiffre d’affaire et volume), mais aussi d’image. En effet, les FAV permettent aux enseignes de démontrer leur aptitude à dénicher des pépites ou présenter des blockbusters. Par exemple, Lidl avait créé le buzz en 2016 en offrant du Château Yquem à ses clients. Même si quelques dizaines de bouteilles seulement étaient disponibles, ça a suffit à faire parler de l’enseigne (et à faire enrager Bernard Arnault puisque les bouteilles provenaient bien sûr du marché parallèle, le « marché noir » du vin). Côté producteurs c’est le moment de sortir des pépites plus confidentielles, ou alors de doper sa notoriété. Ici par exemple avec les vins engagés Oé (bio, sans pesticides, bouteilles consignées, pas de capsule…), sélectionné par Veepee.com. 4,5 millions de visiteurs par jour (Les Echos), une belle mise en avant pour une marque lancée en 2020 !
Deuxième info, il existe plusieurs FAV. Celle de printemps (en avril, FAVP pour les intimes), fait la part belle aux bons rapports qualité-prix. Celle d’automne (septembre-octobre, FAVA), est l’occasion de démontrer la puissance de sourcing de chaque distributeur. Attendez-vous donc à une sélection plus pointue ! Certains distributeurs parlent aussi de Foire aux Vins d’Été, histoire de pousser le concept encore plus loin. En général, il s’agit d’un assortiment de rosés proposés pendant l’été, rien de passionnant. En ce moment, c’est donc la FAVA 2020. Vous trouverez sur le site de Jean Nicolas Mouretin l’intégralité des dates pour cette saison, ainsi que quelques cuvées qu’il a démarquées. Mais au fait, comment elles sont sélectionnées ces cuvées ?
Les phases de sourcing & dégustation
Supposons : vous êtes la personne en charge des achats vins d’une enseigne. Votre métier a deux facettes. La première consiste à sourcer les meilleures cuvées pour votre enseigne. Vous pouvez soit demander à vos fournisseurs en place de vous proposer de nouveaux vins, soit sourcer vous mêmes en salon ou au vignoble. Pour les plus gros distributeurs, cela peut représenter jusqu’à 4000 vins ! Il va falloir élaguer… On passe à la dégustation : TOUTES les cuvées sont goûtées (sauf éventuellement quelques grands crus bordelais). Un dégustateur entraîné peut avoir à goûter 300 vins par jour… Assez intense, mais nécessaire.
Il est pour moi une qualité indispensable à cette phase, c’est de pouvoir distinguer ce qui vous plaît personnellement vs ce qui plait aux clients de votre enseigne. Vous n’aimez pas le vin rosé ? Est-ce que cela signifie que vous allez priver votre enseigne de vin rosé pour une Foire aux Vins de Printemps ? Assez impensable. Vous allez donc vous attacher aux qualités intrinsèques des vins que vous dégustez, pas à ce que vous aimez.
La phase de négociation
La seconde facette de votre métier est la négociation puisque vous êtes garant du bon positionnement tarifaires des vins sélectionnés. Grâce à cette facette, vous garantissez à vos clients fidèles un prix cohérent d’une année sur l’autre. En fonction de l’enseigne, l’une ou l’autre des facettes s’exprime davantage (en grande distribution, vous seriez à 2% sourceur pour 98% négociateur). De mes observations, pour construire votre négociation, vous allez devoir établir un savant équilibre entre les paramètres suivants :
Surpris que le goût ne soit qu’un paramètre parmi d’autres ? Et pourtant, quand un client achète le fruit de votre sélection, en général il n’a pas eu la chance de goûter avant… Mettez-vous donc à sa place. Votre client cherche à acquérir un bon rapport qualité-prix (si cette personne est normalement constituée du moins). Une bombe en dégustation qui présente mal, n’a aucune distinction (médaille, note) et aucune notoriété ne sera pas achetée. Les articles presses, les conseils des amis, le design de l’étiquette, etc., sont autant de critères qui vont contribuer à apprécier la qualité du vin sans l’avoir goûté.
Voilà, vous savez tout pour constituer une gamme cohérente pour votre Foire aux Vins imaginaire. L’étape d’après sera de la proposer à vos clients… Et d’attendre leur verdict !
J’espère que les deux étapes mentionnées se font en sens inverse, càd D’ABORD sélectionner les meilleures cuvées, ENSUITE seulement négocier le prix! Je crains malheureusement que, pour beaucoup d’enseignes, vous n’ayiez raison…
Bonjour Gerard, enseigne est un terme très générique, il s’agit bien sûr de la grande distribution, mais aussi d’enseignes spécialistes comme Vinatis, Lavinia etc. Du coup la majeure partie d’entre elles déguste avant de négocier (heureusement !)